La Fête de l’Assomption Marquée par le Déclin du Quartier de Bel-Air
Port-au-Prince, le 15 août 2023 – La célébration annuelle de la Fête de l’Assomption à la Cathédrale de Port-au-Prince a pris une teinte sombre cette année.
Il est 6h27 dans ma montre. Le soleil peine à briller dans les dédales de la rue Montalais. Les fidèles, pour la grande majorité des femmes dépassant la quarantaine vêtues de bleu, chuchotent en prenant la direction de la Cathédrale de Port-au-Prince. À côté de l’école Jean-Marie Guilloux gît encore les ruines de l’ emblatique Cathédrale, ce monument pour lequel des millions ont été recueilliis et toujours pas reconstruit. À l’archevêché de Port-au-Prince, les portes sont à moitié ouvertes.
Le quartier autrefois vibrant et animé a été décrit par la ministre de la justice Émilie Prophète comme un “quartier perdu”, marqué par l’absence de commerces traditionnels, des murs criblés de balles et une atmosphère de désolation.
L’ambiance autrefois joviale et vivante qui caractérisait la période de la Fête de l’Assomption a cédé la place à une atmosphère tendue et effrayante. Les rues autrefois bondées de fidèles, participant à des processions colorées et à des rituels sacrés, sont désormais hantées par des barricades de briques et des murs troués. Les arbustes qui poussent à travers les rues évoquent les paysages post-apocalyptiques de la série “The Last of Us”, créant ainsi un contraste frappant avec les souvenirs d’une époque où la rue Dr Aubry était un lieu de grands échanges commerciales, le fameux “bò katedral”. A la rue des Fonforts, des tranchés sont visibles comme s’il s’agissait d’un champ de bataille de la guerre 14-18.
Malgré les annonces de paix entre les gangs, le quartier de Bel-Air reste plongé dans une atmosphère de crainte et de méfiance. Les promesses de réconciliation et de restauration de la sécurité n’ont pas encore abouti à des changements significatifs pour les habitants de la région. La désolation qui règne dans les rues a laissé un impact profond sur les célébrations religieuses également. Les coutumes telles que l’ouverture anticipée de l’église à 6 heures du matin et les processions à travers les rues ont disparu, laissant place à un silence déconcertant.
La Fête de l’Assomption, autrefois une occasion de joie et de dévotion, est maintenant teintée de tristesse et de préoccupation. Les fidèles qui autrefois se rassemblaient en masse pour honorer cette fête patronale ont été découragés par la réalité amère du quartier de Bel-Air. Les habitants et les fidèles sont confrontés à un paysage urbain en déclin, marqué par la détérioration des infrastructures et le sentiment persistant d’insécurité.
Alors que les dirigeants locaux et nationaux cherchent des solutions pour revitaliser et sécuriser le quartier de Bel-Air, la Fête de l’Assomption sert de rappel poignant des défis complexes auxquels fait face cette communauté. Entre l’espoir de restaurer la gloire passée du quartier et la réalité désolante qui règne actuellement, il reste encore beaucoup à faire pour transformer Bel-Air en un lieu où les traditions festives et religieuses peuvent à nouveau prospérer.
Rodney Zulmé
